Réponses aux demandes d'information

​​​Les réponses aux demandes d’information (RDI) sont des rapports de recherches sur les conditions dans les pays. Ils font suite à des demandes des décideurs de la CISR.

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Les réponses aux demandes d'information (RDI) citent des renseignements qui sont accessibles au public au moment de leur publication et dans les délais fixés pour leur préparation. Une liste de références et d'autres sources consultées figure dans chaque RDI. Les sources citées sont considérées comme les renseignements les plus récents accessibles à la date de publication de la RDI.    

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C'est aux commissaires indépendants de la CISR (les décideurs) qu'il incombe d'évaluer les renseignements contenus dans les RDI et de décider du poids qui doit leur être accordé après avoir examiné les éléments de preuve et les arguments présentés par les parties.    

Les renseignements présentés dans les RDI reflètent uniquement les points de vue et les perspectives des sources citées et ne reflètent pas nécessairement la position de la CISR ou du gouvernement du Canada.    

1 mai 2014

ERI104861.EF

Érythrée : information sur les procédures suivies par la police à Asmara pour délivrer et remettre des sommations ou des ordonnances aux suspects ou aux personnes qui n'ont pas respecté la condition voulant qu'elles soient tenues de se présenter, y compris de l'information indiquant si l'ordonnance ou la sommation doit être remise à la personne visée ou si elle peut être laissée à un membre de la famille; l'aspect physique de l'ordonnance ou de la sommation (2013)

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Contexte

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un politologue spécialiste de la Corne de l'Afrique, qui a passé de longues périodes en Érythrée de 1995 à 2010 afin d'y mener diverses recherches [notamment sur des sujets liés au développement, à la stabilité sociale et à la sécurité (politologue 30 avr. 2014)] et qui est affilié à l'Institut des affaires africaines (Institute of African Affairs) du German Institute of Global and Area Studies (GIGA) [institut de recherche indépendant à Hambourg qui effectue des recherches sur le développement politique, économique et social en Afrique, en Asie, en Amérique latine et au Moyen-Orient (GIGA s.d.)], a fourni les renseignements suivants :

[traduction]

[L'appareil judiciaire de l'Érythrée, qui est formé d'un système hybride de tribunaux et de forces de sécurité, est désorganisé.

Le système judiciaire ordinaire est faible et susceptible d'ingérence politique - la Cour suprême n'existe plus depuis que le juge en chef a été congédié pour des motifs politiques en 2001.

Les affaires civiles sont habituellement régies par le droit coutumier; elles sont traitées par les tribunaux de la charia dans le cas des musulmans ou par les tribunaux communautaires, qui sont formés de juges non professionnels nommés par le gouvernement et censés rendre des verdicts sur la base du droit coutumier.

Il y a aussi des tribunaux spéciaux dirigés par des officiers qui traitent les cas (présumés) de corruption. Les officiers ont le pouvoir d'arrêter les conscrits de l'armée ou du service national qui, par exemple, ne répondent pas à l'appel de mobilisation ou ont un mauvais rendement.

Fait particulier en Érythrée, il est rare qu'un prisonnier soit accusé d'avoir commis une infraction et doive comparaître devant un tribunal - il est simplement arrêté, maintenu en détention et libéré après une période établie arbitrairement.

Diverses autorités, à savoir les forces de police ordinaires, les organes de sécurité publique et les forces de commandants militaires, ont de fait le pouvoir d'emprisonner les personnes soupçonnées d'avoir commis un crime ou d'avoir tenté de se soustraire au service militaire. Elles peuvent également emprisonner des personnes pour des motifs politiques ou religieux (politologue 26 avr. 2014).

Il ressort des Country Reports on Human Rights Practices for 2013 publiés par le Département d'État des États-Unis que [traduction] « les arrestations et les détentions arbitraires sont demeurées courantes » (É.-U. 27 févr. 2014, 4). Selon les Country Reports 2013,

[traduction]

[l]a police était chargée de maintenir la sécurité intérieure, et l'armée était responsable de la sécurité extérieure. Cependant, le gouvernement a parfois fait appel aux forces armées, aux réserves, aux soldats démobilisés ou à la milice civile nouvellement formée pour répondre aux exigences en matière de sécurité intérieure et extérieure. Les agents du Bureau de la sécurité nationale, qui relève du Bureau du président , étaient chargés de détenir les personnes soupçonnées de menacer la sécurité nationale. Les forces armées ont le pouvoir d'arrêter et de détenir des civils. La police n'intervient généralement pas dans les affaires touchant la sécurité nationale (ibid., 5).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un journaliste érythréen établi au Canada a souligné que [traduction] « la sécurité intérieure n'est pas uniquement maintenue par la police; elle est également maintenue par les forces armées. Le gouvernement a recours aux forces armées pour soutenir les policiers dans l'accomplissement de leurs activités » (journaliste 29 avr. 2014).

2. Sommations ou ordonnances de la police

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun renseignement sur la délivrance et la remise des sommations ou des ordonnances de la police pour l'année 2013.

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un professeur érythréen de sociologie qui est agrégé supérieur de recherche à l'Université d'Oslo, en Norvège, et conseiller principal au sein d'un groupe érythréen de recherche à l'International Law and Policy Institute (ILPI), institut indépendant en Norvège qui mène des recherches dans le domaine de la bonne gouvernance, de la paix et des conflits et du droit international (ILPI s.d.), s'est dit d'avis [traduction] « [qu']en général, il n'y a aucune procédure d'usage […] en place en Érythrée, où la primauté du droit est absente » (agrégé supérieur de recherche 24 avr. 2014). Au cours d'un entretien téléphonique avec la Direction des recherches, le président du Comité central du Parti érythréen al-Nahda (Eritrean Al-Nahda Party - ENP) à Addis-Abeba, parti qui s'oppose au gouvernement de l'Érythrée (ENP 4 sept. 2013), a aussi affirmé [traduction] « [qu'] il n'y a aucune primauté du droit en Érythrée » (ibid. 25 avr. 2014).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un représentant du Eritrean-Canadians Human Rights Group of Manitoba (EHRGM), association militante de Winnipeg qui sensibilise la population aux violations des droits de la personne commises par le gouvernement de l'Érythrée à l'endroit de ses citoyens (EHRGM s.d.), a fourni les renseignements ci-dessous après avoir consulté d'anciens membres du corps de police de l'Érythrée, des chercheurs sur l'Érythrée et des professionnels du droit au Canada (ibid. 28 avr. 2014). Il a dit que deux [traduction] « catégories de personnes peuvent avoir des démêlés avec le régime et la "justice" en Érythrée, faire l'objet [d'affaires criminelles et] d'affaires liées à la sécurité nationale ou avoir des problèmes de nature politique ou militaire » (ibid.). Il a précisé qu'en ce qui concerne les affaires criminelles, dans le cas des personnes qui sont considérées comme des délinquants suivant le code criminel de l'Érythrée, [traduction] « les dispositions du code de procédure pénale transitoire sont respectées » (ibid.). Le journaliste a signalé que [traduction] « lorsqu'une personne est recherchée pour des motifs autres que politiques et religieux, en raison par exemple d'un conflit familial, d'un litige concernant un terrain ou d'un différend avec un voisin, la police délivre une sommation » (29 avr. 2014). Le représentant du EHRGM a écrit que, dans le cas des affaires criminelles,

[traduction]

la police prépare une sommation et la remet à la personne qui porte l'accusation. On demande à la personne lésée de remettre la sommation en personne au suspect. La sommation précise qu'il doit se présenter en cour à la date et à l'endroit indiqués. S'il omet de se présenter, l'accusé devra répondre de ses actes devant la justice. Si cette procédure échoue, la police devra préparer une autre sommation afin que l'accusé comparaisse devant les tribunaux.

Selon la nature du crime, (s'il s'agit d'un homicide ou d'un autre crime grave, ou s'il s'agit d'une infraction flagrante - l'accusé a été pris en flagrant délit), l'accusé sera mis en détention immédiatement après la perpétration du prétendu crime (28 avr. 2014).

Dans une autre communication écrite, le représentant du EHRGM a ajouté que,

[traduction]

conformément au code de procédure pénal, la personne qui porte plainte doit remettre la sommation au suspect. Sinon, la police emmène le présumé contrevenant au poste de police afin de l'interroger ou de le mettre en état d'arrestation. Dans la pratique, il est possible qu'une sommation soit laissée au voisin du présumé contrevenant ou à une personne résidant à la même adresse que ce dernier (EHRGM 29 avr. 2014).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun renseignement allant dans le même sens que ceux présentés ci-dessus.

Le président du Comité central du Parti érythréen al-Nahda (ENP) a dit qu'il n'y avait pas de procédures judiciaires ni de sommations en Érythrée (ENP 25 avr. 2014). D'après le représentant du EHRGM, [traduction] « aucune sommation n'est délivrée relativement aux affaires de sécurité nationale ou de nature politique ou militiaire » (EHRGM 28 avr. 2014). Il a déclaré que, dans de nombreuses affaires, y compris celles [traduction] « mettant en cause des membres du service national qui omettent de se présenter à leur unité ou des personnes "accusées" de ne pas avoir rempli leurs obligations nationales » et « diverses » autres affaires de « nature politique »,

[traduction]

aucune sommation n'est en pratique délivrée aux suspects ou aux personnes qui omettent de se présenter. Par exemple, si les forces de sécurité ou la police militaire de l'Érythrée recherchent une personne, elles ne prépareront aucune sommation; elles arrêteront tout simplement cette personne pour la conduire en prison. Si un membre du service national a omis de se présenter à son unité, les membres de l'unité en informent le poste de police local ainsi que l'administration locale. Les membres de l'unité peuvent venir le chercher chez lui et fouiller son domicile, et ils demandent généralement à ses parents de leur dire où il se trouve. L'administration locale donne aussi suite à l'affaire en refusant des coupons et des services aux parents du membre fautif jusqu'à ce que celui-ci se présente pour son service militaire. Dans certains cas, les membres de l'unité emmènent les parents et les envoient dans un centre de détention de la police ou de l'armée de leur localité ou d'une autre région. Dans d'autres cas, ils ne les importunent pas. Tout dépend de la manière dont ils souhaitent procéder.

Les affaires mettant en cause des membres du service national qui omettent de se présenter à leur unité, des personnes « accusées » de ne pas avoir rempli leurs obligations nationales ou des personnes soupçonnées de constituer une menace pour la sécurité nationale, et de nombreuses autres affaires ne sont pas considérées comme des crimes qui doivent donner lieu à des procédures devant les tribunaux criminels en Érythrée. Il s'agit d'affaires de nature politique ou touchant la sécurité. Les contrevenants ne sont pas accusés et ne sont pas traduits en justice. Ils n'ont pas d'avocat. Dans la plupart des cas, ils ne sont pas connus où ils sont détenus. Par conséquent, aucune sommation n'est délivrée relativement aux affaires de nature politique ou touchant la sécurité.

Il existe aussi un tribunal spécial qui se penche sur les cas de détournement de fonds et de corruption et qui n'autorise aucune représentation juridique ni aucun appel. Nous ne savons pas avec certitude si des sommations sont préparées dans de tels cas (ibid.).

Le politologue a déclaré ce qui suit :

[traduction]

À ma connaissance, les tribunaux délivrent rarement, voire jamais, des ordonnances ou des sommations aux suspects. Les arrestations sont effectuées par la police, l'armée ou les forces de sécurité sans ordonnances écrites. Elles suivent habituellement les ordres donnés de vive voix par leurs supérieurs dans la police ou l'armée ou parmi les dirigeants politiques. Les tribunaux n'ont pas voix au chapitre relativement à ces procédures. Les conscrits qui omettent de se présenter sont arrêtés à la demande, formulée de vive voix, de leurs supérieurs - comme il a été précisé, il n'existe aucune procédure régulière et la primauté du droit est absente. Par conséquent, je doute que des sommations soient utilisées dans le cadre de ce processus, mais si c'est le cas, il est fort possible qu'elles soient remises à des membres de la famille en l'absence du suspect.

Aucune procédure régulière ne régit la délivrance des sommations. Les ordres sont généralement donnés de vive voix sans qu'aucune procédure juridique ne soit respectée. Les membres de la famille d'un suspect peuvent être arrêtés à sa place s'il est absent, et ce, afin d'exercer des pressions sur lui pour qu'il se livre aux autorités (26 avr. 2014).

Le journaliste a écrit ceci :

[traduction]

[À] Asmara, la police ne respecte pas les lois écrites, qui ne sont pas appliquées en ce qui concerne la délivrance d'ordonnances ou l'arrestation de suspects.

La loi prévoit que la police doit mener une enquête et obtenir un mandat avant d'arrêter qui que ce soit. Lorsqu'elle arrête un individu, elle doit le faire comparaître devant un juge dans les 48 heures suivant l'arrestation et le libérer dans un délai de 28 jours si elle ne porte pas d'accusation contre lui.

Cependant, ce ne sont là que des directives écrites. La police ne suit en aucun cas la procédure appropriée, particulièrement si des croyances politiques et religieuses sont en cause ou si une personne s'est soustraite au service national. Elle arrête simplement le suspect pour ensuite le mettre en prison. Les suspects demeurent en état d'arrestation durant des mois ou des décennies sans que des accusations soient portées contre eux (29 avr. 2014).

3. Aspect physique des sommations ou des ordonnances de la police

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun renseignement sur l'aspect physique des sommations ou des ordonnances de la police.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références

Agrégé supérieur de recherche, University of Oslo, Norvège. 24 avril 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Eritrean Al-Nahda Party (ENP). 25 avril 2014. Entretien téléphonique avec le président du Central Committee.

Eritrean Al-Nahda Party (ENP). 4 septembre 2013. Entretien téléphonique avec le président du Central Committee.

Eritrean-Canadians Human Rights Group of Manitoba (EHRGM). 29 avril 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un représentant.

Eritrean-Canadians Human Rights Group of Manitoba (EHRGM). 28 avril 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un représentant.

Eritrean-Canadians Human Rights Group of Manitoba (EHRGM). S.d. « About Hidmona ». [Date de consultation : 28 avr. 2014]

États-Unis (É.-U.). 27 février 2014. « Eritrea ». Country Reports on Human Rights Practices for 2013. [Date de consultation : 28 avr. 2014]

German Institute of Global and Area Studies (GIGA). S.d. « Mission and Values ». [Date de consultation : 28 avr. 2014]

International Law and Policy Institute (ILPI). S.d. « This is ILPI ». [Date de consultation : 21 avr. 2013]

Journaliste. 29 avril 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Political Scientist. 30 Avril 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Political Scientist. 26 avril 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Autres sources consultées

Sources orales : Les tentatives faites pour joindre dans les délais voulus les personnes et les organisations suivantes ont été infructueuses : Erythrée – Ministry of Information, Ministry of Justice; Eritrean Law Society; trois avocats à Asmara; quatre postes de police à Asmara.

Sites Internet, y compris : Amnesty International; Asmarino; ecoi.net; ; Eritrea24; Eritrea Daily; Erythrée – Ministry of Information; Factiva; Freedom House; Human Rights Watch; International Crisis Group; Interpol; Hauser Global Law School Program; Nations Unies – Refworld, Réseaux d'information régionaux intégrés; Transparency International.



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