Réponses aux demandes d'information

​​​Les réponses aux demandes d’information (RDI) sont des rapports de recherches sur les conditions dans les pays. Ils font suite à des demandes des décideurs de la CISR.

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Les réponses aux demandes d'information (RDI) citent des renseignements qui sont accessibles au public au moment de leur publication et dans les délais fixés pour leur préparation. Une liste de références et d'autres sources consultées figure dans chaque RDI. Les sources citées sont considérées comme les renseignements les plus récents accessibles à la date de publication de la RDI.    

Les RDI n'apportent pas, ni ne prétendent apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile donnée. Elles visent plutôt à appuyer le processus d'octroi de l'asile. Pour obtenir plus de renseignements sur la méthodologie utilisée par la Direction des recherches, cliquez ici.   

C'est aux commissaires indépendants de la CISR (les décideurs) qu'il incombe d'évaluer les renseignements contenus dans les RDI et de décider du poids qui doit leur être accordé après avoir examiné les éléments de preuve et les arguments présentés par les parties.    

Les renseignements présentés dans les RDI reflètent uniquement les points de vue et les perspectives des sources citées et ne reflètent pas nécessairement la position de la CISR ou du gouvernement du Canada.    

24 novembre 2014

CMR105001.F

Cameroun : information indiquant si un homme peut obtenir des renseignements sur la fertilité de la femme qu'il veut épouser; information sur les options qui existent pour remédier à l'infertilité, tant du point de vue de la médecine moderne que de celui des pratiques traditionnelles (2011-novembre 2014)

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Accès à des renseignements sur la fertilité d'une future épouse et importance de la fertilité au Cameroun

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, une représentante du ministère de la Promotion de la femme et de la Famille du Cameroun a signalé qu'il est possible pour un homme d'obtenir des renseignements sur la fertilité de la femme qu'il veut épouser (Cameroun 17 nov. 2014). Elle a ajouté que [traduction] « c'est une pratique courante au sein de certains groupes ethniques des régions du Nord, de l'Ouest et du Nord-Ouest du pays, où les "fiançailles précoces" sont répandues » (ibid.). La représentante du Ministère a également affirmé que, dans la région de l'Ouest, [traduction] « il est normal pour une famille d'accepter que l'on teste la fertilité de sa fille en l'unissant à son prétendant [pour vérifier si elle peut devenir enceinte], avant qu'une dot soit versée » (ibid.).

Cependant, la directrice administrative de Reach Out Cameroon (REO), une ONG dont le siège se trouve près de Buea [capitale de la région du Sud-Ouest du Cameroun] et qui se consacre aux droits des femmes (REO s.d.), a affirmé, dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, qu'au Cameroun, ce n'est pas une pratique courante pour un homme d'obtenir de l'information sur la fertilité de sa future épouse (directrice administrative 12 nov. 2014). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, la coordonnatrice de l'ONG Association de lutte contre les violences faites aux femmes (ALVF) [1] a également affirmé, en parlant particulièrement des communautés des « régions septentrionales » du Cameroun, que la fertilité « est vérifiée après le mariage, car, dans la plupart [de ces communautés], les relations intimes hors mariage sont proscrites, et la culture des tests prénuptiaux n'est pas [habituelle] » (coordonnatrice 15 nov. 2014).

Au Cameroun, il y aurait des pressions sociales importantes pour concevoir des enfants (chercheuse postdoctorale 17 nov. 2014; France 24 17 oct. 2014; Tangwa 2014, 946). Des sources notent que les problèmes d'infertilité au sein des couples occasionnent des problèmes pour les femmes, en particulier (France 24 17 oct. 2014; chercheuse postdoctorale 17 nov. 2014; EnQuête 5 févr. 2013), qui en portent le blâme (ibid.; chercheuse postdoctorale 17 nov. 2014). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, une chercheuse postdoctorale de l'Université libre d'Amsterdam (Free University of Amsterdam) qui fait de la recherche sur les droits des femmes au Cameroun a déclaré, sans fournir de détails, que [traduction] « la vie d'une femme mariée incapable d'avoir un enfant peut être extrêmement difficile et dangereuse » (ibid.).

D'après la chercheuse postdoctorale, [traduction] « dans certaines régions et cultures du Cameroun, il est courant pour les femmes d'avoir des enfants avant de se marier, afin de prouver qu'elles sont fertiles » (ibid.). De même, la représentante du Ministère a déclaré que, [traduction] « dans la région du Centre, les hommes préfèrent se marier avec une femme qui a déjà eu au moins un enfant en dehors des liens du mariage » (Cameroun 17 nov. 2014).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, une professeure de démographie sociale et d'anthropologie du Carleton College au Minnesota, qui fait de la recherche sur les soins de santé relativement à la reproduction au Cameroun, notamment en ce qui a trait à l'infertilité, a expliqué ce qui suit :

[traduction]

Autrefois, c'était vu comme une honte pour une femme (et sa famille) de devenir enceinte avant le mariage, mais cela arrive maintenant de plus en plus fréquemment; pour certains hommes ou leur famille, le fait qu'une femme ait réussi à devenir enceinte ou à donner naissance, même en dehors des liens du mariage, est attrayant, dans une région où l'infertilité est relativement élevée (professeure 11 nov. 2014).

La professeure a ajouté que c'est particulièrement le cas dans le Sud du pays, qui fait historiquement partie d'une zone de l'Afrique centrale où l'infertilité est élevée (ibid.). D'autres sources mentionnent également l'existence de cette zone où les habitants seraient plus touchés par l'infertilité en Afrique centrale (Nations Unies déc. 2010, 881; Encyclopedia of Public Health 2008, 783). Selon l'Encyclopedia of Public Health, un ouvrage de référence paru en 2008 qui se veut un abrégé de l'état des connaissances dans le domaine de la santé publique (Springer s.d.), près d'un tiers des couples de cette région souffriraient de problèmes de fertilité (Encyclopedia of Public Health 2008, 783). D'autres sources notent que jusqu'à 30 p. 100 des couples de l'Afrique subsaharienne seraient touchés par l'infertilité, dans une région du monde où, paradoxalement, le taux de natalité est élevé (France 24 17 oct. 2014; Nations Unies déc. 2010, 881).

2. Options qui existent pour remédier à l'infertilité
2.1 Médecine moderne

La directrice administrative a déclaré qu'il est [traduction] « peu probable » que les gens aient accès à des soins médicaux pour traiter l'infertilité, les services les plus modernes se trouvant seulement dans les grands centres urbains (directrice administrative 13 nov. 2014). Elle a ajouté que l'accès aux soins de santé en général est un problème dans les zones reculées (ibid.). De même, la coordonnatrice pour l'ALVF a affirmé ce qui suit :

[pour ce qui est] des options médicales, toutes les [équipes] sanitaires disposent d'infirmiers accoucheurs, de sages-femmes ou d'agents de santé. [Ils] offrent des services en matière de [...] reproduction qui prennent aussi en compte la résolution de problèmes d'infertilité. Certains hôpitaux disposent également de gynécologues, mais ces spécialistes sont en nombre insuffisant et sont absents des [équipes] sanitaires dans les zones reculées ou à la campagne. [...] les personnes plus nanties [...] peuvent [avoir] recours aux cliniques privées dans les grandes villes, comme Yaoundé et Douala, où des services de procréation assistée sont disponibles (coordonnatrice 18 nov. 2014).

De son côté, la professeure a affirmé n'être au courant de l'existence de cliniques traitant l'infertilité qu'à Douala et à Yaoundé, les deux grands centres urbains du pays (professeure 13 nov. 2014).

Dans un article sur la bioéthique au Cameroun, un professeur de philosophie de l'Université de Yaoundé a affirmé que la première clinique de fertilité au pays a vu le jour en 1972 (Tangwa 2014, 946). Le premier bébé conçu grâce à la fécondation in vitro en Afrique centrale est né en 1998 à Douala (Clinique médicale Odyssée s.d.a; Clinique de l'aéroport s.d.a; Info-Afrique 26 déc. 2012). Deux centres de traitement, la Clinique médicale Odyssée et la Clinique de l'aéroport, seraient nés de cette première expérience de fécondation in vitro (ibid.). Entre autres spécialités, les deux cliniques disent apporter une assistance médicale en matière de procréation depuis 1997, notamment au moyen de l'insémination artificielle et de la fécondation in vitro (Clinique médicale Odyssée s.d.a; Clinique de l'aéroport s.d.a). Les deux cliniques sont situées à Douala (ibid. s.d.b; Clinique médicale Odyssée s.d.b).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé de renseignements sur ce qu'il en coûte pour recevoir des traitements dans ces cliniques en particulier. Cependant, directrice administrative et la professeure ont toutes deux affirmé que les traitements médicaux contre l'infertilité n'étaient accessibles qu'aux plus fortunés (directrice administrative 13 nov. 2014; professeure 13 nov. 2014). Selon l'article du professeur de philosophie, la fécondation in vitro, en particulier, est [traduction] « financièrement inabordable pour la grande majorité des gens qui pourraient en avoir besoin » (Tangwa 2014, 946). Par ailleurs, la coordonnatrice pour l'ALVF a affirmé que

l'accès aux mesures médicales pour traiter l'infertilité est payant et, compte tenu du pouvoir d'achat, les couples demandeurs ne sont pas souvent en mesure d'aller jusqu'à la sollicitation de la procréation médicale assistée. Par exemple, selon certaines informations recueillies, les coûts pour le traitement médical assisté peu[vent] aller jusqu'à deux millions de francs [CFA] et plus [environ 4 340 $ CAN] (coordonnatrice 18 nov. 2014).

La coordonnatrice a ajouté ce qui suit :

[d]ans les petites localités, il n'existe pas de centres de traitement; toutefois, beaucoup [d'équipes] sanitaires tenues par des institutions confessionnelles disposent de personnel qualifié dans des localités reculées et sont fréquentées par plusieurs couples ordinaires. Les coûts des traitements [qui y sont] pratiqués sont accessibles (ibid.).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements sur des centres de traitement de l'infertilité qui se trouveraient hors des grands centres urbains.

2.2 Pratiques traditionnelles

On peut lire dans l'article du professeur de philosophie de l'Université de Yaoundé que [traduction] « la procréation assistée n'est pas une nouveauté au Cameroun : elle représente un aspect culturel important de la plupart des tribus ou ethnies » (Tangwa 2014, 946). L'auteur explique que, traditionnellement, en cas d'infertilité d'un couple, une femme peut faire en sorte que son mari prenne une deuxième épouse; l'homme peut aussi demander à un de ses proches parents d'avoir un enfant avec sa femme (ibid.). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

De son côté, la coordonnatrice a affirmé que, « [d]ans la plupart des couples sans enfant, les partenaires finissent [...] par se séparer, ou l'homme impose à son épouse une coépouse, quel que soit le régime matrimonial sous lequel ils sont mariés » (coordonnatrice 18 nov. 2014).

Selon la directrice administrative, les Camerounais se tournent autant vers les pratiques traditionnelles que vers la médecine moderne pour tenter de remédier aux problèmes d'infertilité (directrice administrative 13 nov. 2014). De même, la coordonnatrice a déclaré qu'une situation d'infertilité « oblige tous les couples [à] utiliser, selon leurs moyens ou ressources, des options traditionnelles et médicales à la fois » (coordonnatrice 18 nov. 2014). Selon la professeure, il existe [traduction] « toutes sortes de traitements offerts par des praticiens de médecines traditionnelles, mais ils ne seraient pas considérés comme efficaces du point de vue médical ou épidémiologique » (professeure 13 nov. 2014). La directrice administrative a ajouté que, dans les zones éloignées, en particulier, la population se tourne vers les pratiques traditionnelles pour traiter toutes sortes de maux (directrice administrative 13 nov. 2014). Selon elle, les croyances traditionnelles de certains groupes véhiculent l'idée que les pratiques traditionnelles sont les plus efficaces et attribuent parfois l'infertilité à des mythes (ibid.)

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Note

[1] Créée en 1991, l'ALVF cherche notamment à promouvoir « un statut social équitable » et « des valeurs humaines positives qui prennent en compte la différence des deux sexes », par l'entremise de ses bureaux situés dans les régions du Centre, de l'Extrême-Nord, du Littoral et de l'Ouest du Cameroun (Juristes-Solidarités s.d.).

Références

Cameroun. 17 novembre 2014. Ministère de la Promotion de la femme et de la Famille du Cameroun. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par une représentante.

Chercheuse postdoctorale, Free University of Amsterdam. 17 novembre 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Clinique de l'aéroport. S.d.a. « Clinique de l'aéroport : accueil ». [Date de consultation : 20 nov. 2014]

Clinique de l'aéroport. S.d.b. « Contact ». [Date de consultation : 24 nov. 2014]

Clinique médicale Odyssée. S.d.a. « L'assistance médicale à la procréation ». [Date de consultation : 20 nov. 2014]

Clinique médicale Odyssée. S.d.b. « Informations légales et charte éthique ». [Date de consultation : 24 nov. 2014]

Coordonnatrice, Association de lutte contre les violences faites aux femmes (ALVF). 18 novembre 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Coordonnatrice, Association de lutte contre les violences faites aux femmes (ALVF). 15 novembre 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Directrice administrative, Reach Out Cameroon (REO). 13 novembre 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Directrice administrative, Reach Out Cameroon (REO). 12 novembre 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Encyclopedia of Public Health. 2008. « Infertility Belt ». Sous la direction de Wilhelm Kirch. New York : Springer Science+Business Media. Volume 2 : I-Z. [Date de consultation : 18 nov. 2014]

EnQuête. 5 février 2013. Matel Bocoum. « Le drame de l'infertilité en Afrique subsaharienne : 15 à 30 % des couples touchés ». [Date de consultation : 18 nov. 2014]

France 24. 17 octobre 2014. Coraline Molinié. « Cameroun : infertilité en terre de surnatalité ». [Date de consultation : 18 nov. 2014]

Info-Afrique.com. 26 décembre 2012. Christian Locka. « Dr Ernestine Gwet Bell, à l'origine du premier bébé né in vitro de l'Afrique centrale ». [Date de consultation : 18 nov. 2014]

Juristes-Solidarités. S.d. « Association de lutte contre les violences faites aux femmes (ALVF) ». [Date de consultation : 18 nov. 2014]

Nations Unies. Décembre 2010. Organisation mondiale de la santé (OMS). « Mother or Nothing: The Agony of Infertility ». Bulletin of the World Health Organization. Vol. 88, no 12. [Date de consultation : 18 nov. 2014 ]

Professeure de démographie sociale et d'anthropologie, Carleton College, Northfield, Minnesota. 13 novembre 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Professeure de démographie sociale et d'anthropologie, Carleton College, Northfield, Minnesota. 11 novembre 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Reach Out Cameroon (REO). S.d. « History - Home ». [Date de consultation : 18 nov. 2014]

Springer Science+Business Media. S.d. « Encyclopedia of Public Health ». [Date de consultation : 18 nov. 2014]

Tangwa, Godfrey B. 2014. « Cameroon ». Handbook of Global Bioethics. Sous la direction de Henk A.M.J. ten Have et B. Gordijn. New York : Springer Science+Business Media. [Date de consultation : 31 oct. 2014]

Autres sources consultées

Sources orales : Les tentatives faites pour joindre dans les délais voulus les personnes et organisations suivantes ont été infructueuses : chercheuse postdoctorale en anthropologie, Université d'Amsterdam; Clinique de l'aéroport; Clinique médicale Odyssée; professeur de sociologie africaine, Université de Yaoundé; professeure adjointe d'études africaines, City University of New York (CUNY); Rural Women Development Centre. Les personnes et organisations suivantes n'ont pas pu fournir de renseignements dans les délais voulus : Federation of Women Lawyers Cameroon.

Sites Internet, y compris : AllAfrica; Cahiers d'études africaines; Cameroon Business Directory; CameroonianRoots; Cameroon-Info; Cameroon POSTline; Cameroun Guide GIE; Camerpost; ecoi.net; États-Unis – Department of State; Human Rights Watch; Institut de formation et de recherche démographiques; Irlande – Refugee Documentation Centre; IVF.net; Koaci; Mboa News; Le Messager; Nations Unies – Fonds des Nations Unies pour la population, Refworld, Réseaux d'information régionaux intégrés; Le Quotidien; Royaume-Uni – Home Office.



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